Pourquoi nous réoccupons le bois Lejuc ?

Pourquoi nous réoccupons le bois Lejuc ?

C’est l’histoire d’un territoire colonisé depuis 20 ans par la mafia nucléaire, son argent facile, ses façades ravalées, ses jolis lampadaires et ses vigiles patibulaires, ses caméras et ses visites scolaires, sa fabrique de la résignation et du consentement mou, ses morts de chantiers, sa catastrophe à petite dose.

C’est l’histoire d’un projet qui, sous couvert de « rendre service aux générations futures », organise et pérennise la dépendance à une filière moribonde, creuse des trous interminables pour une accumulation de déchets interminable.

C’est l’histoire d’une lutte de plus de 30 ans, ici, ailleurs, contre l’implantation d’une poubelle nucléaire, combat qui sinue de lieux en lieux, refus assumés, massifs, à coup de manifs monstres, de foules en colère, de goudron et de plumes contre l’ANDRA.

C’est l’histoire d’une forêt occupée et, pour la première fois en 20 ans, d’un lieu libéré du joug de l’ANDRA et de ses travaux, l’histoire de la possibilité, même fugace, d’une prise contre un ennemi partout insaisissable et inatteignable.

C’est l’histoire d’une agence qui, sous couvert de « projet de territoire » ou « d’intégration territoriale », organise l’occupation policière, la surveillance diffuse et la paranoïa des habitant-e-s. Le projet dingue, inédit, prométhéen, sur des centaines d’années, de la reconfiguration intégrale d’un bout de terre et de ceux qui y vivent pour en faire des habitués, sinon des enthousiastes, de la catastrophe permanente. Derrière la poubelle nucléaire, c’est la supérette-ANDRA, la boulangerie- ANDRA et peut-être bientôt, qui sait, l’école-ANDRA ?

Mais c’est surtout l’histoire de gens qui, hier, aujourd’hui, ont dit NON. D’un mouvement d’opposition qui, malgré le temps exceptionnellement long du nucléaire, n’en démord pas et continue de se battre avec pugnacité, des réunions publiques aux recours juridiques, en passant par les blocages et les « démontages ». Et qui, aujourd’hui, malgré la légalisation de la poubelle nucléaire le 11 juillet à l’Assemblée Nationale et le feu vert à leur absurde « phase-pilote », connaît un grand renouveau.

C’est l’histoire de nucléocrates encravatés qui parlent, avec des sourires bedonnants, de « consultation citoyenne », ou concède que « l’opposition existera toujours, mais [qu’]il s’agit de dialoguer avec les citoyens », alors même qu’une pression policière diffuse s’installe partout, que 2 ouvriers sont morts dans leurs galeries sordides, que des paysans font des cancers suite au harcèlement pour récupérer leurs terre, que des personnes sont blessées lors de l’expulsion du bois le 7 juillet, et tant d’autres harcelées, convoquées au commissariat, placées en garde à vue.

Aujourd’hui, nous décidons de la réoccupation du bois Lejuc. Ce n’est pas un copié-collé de ce que nous avions fait le 19 juin, lors de la première occupation. Entre temps, il y a trois semaines d’une vie collective intense, euphorique, magnifique, que jamais les bleus et leurs sales bottes, que jamais les aménageurs et leur cynisme sordide, ne nous enlèveront. Les abatteuses ne déracineront pas les amitiés solides qui naissent à tenir une barricade toute la nuit. Les bottes des flics ne piétinent pas les bourgeons de résistance qui naissent chez les habitant-e-s du coin qui, pour la première fois en 20 ans, relèvent la tête. Ils peuvent grillager totalement la forêt, il peuvent l’emmurer, la blinder, ils peuvent même y mettre des miradors, des matons et l’appeler Guantanamo, mais ils ne boucheront jamais la brèche qui est en train de s’ouvrir à Bure depuis quelques mois. La vraie irréversibilité à Bure, ce n’est pas celle de l’enfouissement définitif des pire déchets, mais c’est surtout des amitiés qui naissent dans la lutte !

Réoccuper, ce n’est pas non plus un coup d’éclat. Il pourront bien nous expulser et nous ré-expulser encore, dans les semaines et les mois qui viennent, il y a mille manières de bloquer les travaux de l’agence, d’autant plus qu’elle va continuer à accélérer la cadence, toute vêtue de ses nouveaux habits de légalité. Cibler les entreprises sous-traitantes, bloquer les travaux à la source, multiplier les moments dans tous les villages, prendre la forêt par différentes entrées, continuer de faire de Bure un lieu central du mouvement antinucléaire : il y aura, qu’on se le tienne pour dit, tout au long de l’#Etéd’urgence et au-delà, de nombreux autres rendez-vous.

Nous le répétons : ce qui se joue actuellement en Meuse est le début de quelque-chose de plus grand. Malgré la fatigue, le stress et la répression, nous remplissons, de jour en jour, notre lutte de moments beaux et magiques. Nous avons l’amour de la forêt et d’une vie libre en partage. Notre combat et notre joie sont contagieux, comme le plaisir de voir des personnes sortir de la résignation et relever la tête. Nous sommes de plus en plus nombreux et nombreuses et nous continuerons à l’être car notre détermination est sans faille et notre colère pas réversible.

D’ores et déjà, nous appelons à un nouveau week-end de Barricades antinucléaires le 13 et le 14 août. Et, partout ailleurs, nous appelons à la formation de multiples comités de soutien partout en France. A partir de la solidarité sans faille des comités autour de la lutte contre l’aéroport de NDDL, solidarité dont témoignage la présence massive de l’Ouest aujourd’hui ! À partir des assemblées antinucléaires régionales existantes ! A partir de toutes celles et ceux qui se rencontrent autour de la rage qu’une aberration comme CIGEO puisse exister, et décident de s’organiser pour inventer d’autres vies sur leur désert. Organisons des actions décentralisées, des tours d’informations, des chantiers, des occupations massives un peu partout.

En bloquant Bure, nous constiperons le nucléaire et le capitalisme dans son impossible exutoire !

ET LA FORET ELLE EST A QUI ? ELLE EST A NOUS ! ANDRA, DEGAGE, RESISTANCE ET AFFOUAGES ! ON NE NOUS ATOMISERA JAMAIS !
Infos : vmc.camp / 0758654889 / sauvonslaforet@riseup.net