14 juillet: No table is illegal

Petit retour de la soirée burienne du 14 juillet

Une fête à la peau lisse

L’air était doux en ce soir de 14 juillet, et les habitant.e.s de la maison de résistance, accompagnées de leurs voisin.e.s venues de tous les villages alentours, ainsi que les cyclistes de passage de l’écotopia biketour festoyaient gaiement, fêtant les récents revers de Cigéo et la joie d’être ensemble.

C’est l’indisposition causée par le passage de 3856ème patrouille de police de la journée, rappel de l’intimidation constante que constitue l’état de militarisation du territoire, qui pousse alors les convives à installer leur table sur la chaussée flambante neuve en face de la maison de résistance, pour y banqueter dans l’allégresse et proposer aux prochaines patrouilles un itinéraire alternatif. Après manger, une partie de foot improvisée fut interrompue par deux gendarmes, demandant instamment de bouger la table, qui « gênerait les déplacements sur la voie publique. » Après leur avoir opposé un refus cordial mais ferme, assurant que nous écarterions la table pour laisser passer les tracteurs et moissonneuses (promesse tenue avec assiduité et célérité tout au cours de la soirée) , la fête se poursuivit tranquillement avec une partie de bowling-pétanque, alors que la patrouille suivante contournait la maison, provoquant quelques rires.

 

La coupure Dubois

C’est quelque peu après la tombée de la nuit que nous reçûmes la visite du bien connu commandant de gendarmerie Bruno Dubois (dont on peut admirer les exploits ici, ici, et là), accompagné d’une patrouille, de trois fourgons de gendarmerie mobile, ainsi que d’une unité du PSIG, pour demander militairement le dégagement de la voie publique, où trônait toujours le meuble coupable. Ce n’est qu’après une heure de pourparlers, infructueux mais rendus tendus par l’éclairage et les caméras de l’équipe bleue, que nous décidons de les ignorer pour se remettre à danser et à chanter, toujours autour de et sur la table.

Un quart d’heure plus tard le Dubois revient vers nous, avec le maire de Bure au téléphone, pour confirmer que nous n’avons pas d’autorisation municipale pour privatiser une section de deux mètres de la voie publique. Nous protestons alors plus vigoureusement face à cette énième provocation du responsable de la montée en tension provoquée par la présence policière depuis fin juin, de nombreu.ses habitant.e.s profitant de l’occasion pour lui faire part de leur ressentiment. L’avancée d’une ligne de gendarme en uniforme devant la maison, filmant et prenant des photos, ne fait rien pour calmer le jeu. La discussion s’envenime, et s’écarte doucement de la table. La fête est interrompue, et la colère monte.

Le maire à boire

Une rumeur parcourt les habitant.e.s de la maison de résistance : le maire de Bure arrive calmer la situation, mais sa voiture est bloquée par un véhicule mal garé. Voilà tout le monde à la recherche du conducteur de la voiture. Les flics semblent ravi.e.s de la confusion, et en profitent pour enclencher un numéro d’intimidation dans le but de décourager les quelques défenseu.ses de la table restant devant la maison. Les gazeuses et le virilisme sont de sortie, et les agents du PSIG font des messes basses une dizaine de mètres en arrière.

Le maire, finalement, arrive, acclamé par la foule. Les discussions commencent. Personne ne semble décidé à renoncer à la table, ni les habitant.e.s dépité.es par l’absurdité du dispositif mis en place pour une simple table ne gênant même pas la circulation, ni le commandant Dubois, trop fier pour concéder la moindre insoumission à son Autorité. Un terrain de négociation finit quand même par émerger : les habitant.es acceptent de retirer la table, certainement pas sur l’ordre du commandant Dubois, mais sur la demande amicale du maire. Le voilà donc qui exige des gendarmes qu’illes partent les premier.e.s, et qu’illes le laissent gérer seul cette situation.

Bien incapable de renoncer complètement, le commandant accepte tout de même d’éloigner ses troupes d’une cinquantaine de mètres. Le maire se met alors en route vers la table pour participer à son déplacement lui-même, acte symbolique que remarqueront plus d’un.e. Il passera un quart d’heure de plus à la maison, pour partager une bière avec les habitant.e.s. La fête se terminera plus tard sous le regard des gendarmes, posté.es au loin, caméras à l’épaule, qui perdront encore deux bonnes heures de leur 14 juillet à rappeler à tou.tes qu’illes ne sont pas près de relâcher la pression exercée sur la région, qui n’a eu de cesse d’augmenter ces dernières semaines…
Ca tombe bien, BZL ne manque pas de tables, ni ses habitant.e.s de détermination, même si l’épreuve se ressentît dans les intestins des participant.e.s le lendemain (quoiqu’en disent les détracteurs de ce délicieux houmous!)