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Communiqué : nouveau passage en force de l’ANDRA dans le Bois Lejuc !


E. Hance, responsable des opérations extérieures de l’ANDRA versant de l’essence sur les militants protégeant l’accès au bois

Ce matin, l’Andra (l’Agence nationale de gestion des déchets radioactifs) a de nouveau tenté de pénétrer dans le bois Lejuc pour reprendre les débris d’un mur en béton dont la construction avait été jugée illégale le 1er août. Nous affirmons ici la légitimité de notre opposition à cette opération de communication.

À 9h10 ce matin, 30 janvier 2017, une pelleteuse, deux tracteurs avec remorques, un huissier, des vigiles et le service de communication de l’Andra  sont venus « nettoyer le bois ». Mais pourquoi n’ont-ils pas retiré les pans de mur à la fin de l’été, lorsque le bois n’était pas occupé ? Le fait qu’ils interviennent quelques jours avant l’échéance légale de « réhabilitation » démontre plutôt de leur part un dernier effort médiatique pour rattraper leurs graves erreurs.

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L’ANDRA, une mafia dans la Meuse

Un réel talent de communication

Non contente de ne pas respecter, une fois de plus, les délais de justice, en faisant une irruption brutale dans le bois ce 23 janvier, avec ses machines et vigiles, l’ANDRA a fait à nouveau la démonstration de son incompétence chronique.

L’été dernier, dans sa précipitation à raccourcir les délais pour les travaux du projet CIGÉO, l’ANDRA avait déjà cru bon s’affranchir de la légalité en défrichant sans autorisation. Une « petite erreur d’appréciation », disait-elle dans son communiqué, après avoir été condamnée en justice à remettre le bois en état sous 6 mois.

Jean-Paul Baillet, le directeur du laboratoire Meuse – Haute-Marne, avait alors cette déclaration surprenante : « Nous n’avons jamais interdit à personne de se promener dans les bois qui nous appartiennent, d’y pique-niquer ou d’y cueillir des champignons. Mais nous devons protéger nos salariés, qui subissent des menaces, et nos matériels scientifiques, qui ont fait l’objet de dégradations. » Difficile, en vérité, de pique-niquer ou cueillir des champignons, quand une armada de gendarmes mobiles empêche l’accès au bois et qu’un mur de 3km s’érige tout autour de celui-ci.

Et pour ce qui concerne la protection de salariés, les vigiles armés de boucliers, manches de pioches, casques et gazeuses, semblaient constituer un rempart pour le moins dissuasif. Après que ces derniers avaient lourdement molesté plusieurs opposant-es, le même J-P Baillet avait alors cru bon de préciser que ses vigiles avaient « très bien fait leur travail ».

Au final, leur travail n’avait pas du tellement plaire à la direction parisienne car ce dernier avait du démissionner très mystérieusement fin août, son départ maquillé en départ en retraite. Nous n’avions alors pas manqué de lui signifier notre regret de le voir partir après quelques années de si bons et laconiques services. En effet, en près de dix années à la direction, il est bien difficile de recenser plus d’une vingtaine de phrases dans ses déclaration à la presse.

Son successeur intérimaire, le commercial Patrick Torres, déjà directeur du centre aubois de Soulaines, n’a pas plus brillé par son talent de communiquant : pour lui, « les centres (de l’ANDRA) ne sont pas la déchetterie du village, on ne frappe pas à la porte pour dire « tiens j’ai quelque chose à livrer » » Nous voilà rassurés d’une telle expertise,digne d’un commercial en produits ménagers.

Le même M. Torres admettait néanmoins que les « opérations de défrichement réalisées dans le Bois Lejuc auraient du bénéficier d’une autorisation de défricher ». Un surprenant mea culpa pour une entreprise habituée à mentir par omission.

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Communiqué : Expulsion imminente

Bure : expulsion imminente des opposant.es antinucléaires !

Passage en force de l’ANDRA, une nouvelle matinée sous tension

Depuis 6 mois, le bois Lejuc, à Bure, est occupé par plusieurs dizaines de personnes pour s’opposer au projet de poubelle nucléaire CIGEO. Les occupants sont convoqués au Tribunal de Grande Instance de Bar le Duc le 25 janvier en vue de leur expulsion. Mais les vigiles et les gendarmes n’ont pas attendu le procès pour tenter de revenir dans le bois. Les prochains jours sont cruciaux dans la lutte contre le projet CIGEO.

Vers 11h du matin nous avons entendu des bruits de machines en forêt. Sur un chemin forestier à deux pas de la communale, une cabane collective, un engin de chantier conduit par le responsable des activités extérieures de l’ANDRA, l’incontournable Emmanuel Hance , était en train de déblayer toutes les barricades et élargir le sentier, escorté par deux voitures de vigiles de l’entreprise EPR.

Les journalistes de France 3 qui venaient tourner un sujet pour le procès intenté par l’ANDRA contre occupan-tes du bois, le 25 janvier, ont assisté à toute la scène et n’ont pas manqué de constater que monsieur Hance n’hésitait pas à repousser à la pelle les opposant-es tentant d’entraver l’avancée de la machine au risque de les blesser. Dans le même temps, un second engin de chantier, également escorté, était repéré et repoussé sur la route forestière centrale juste avant que ne soit détruite la dernière barricade d’accès à la cuisine collective.

Au final, nous sommes parvenu-es à faire refluer l’ANDRA jusqu’au centre de la forêt, au niveau d’une future construction, mise à terre. En retrait, trois camions de chantiers de l’entreprise Chardot, chargés de gravas, attendaient de créer de nouveaux chemins d’accès. Prétendument pour déblayer le mur mis à terre en août. Alors que trois audiences en justice nous opposent encore à l’ANDRA dans les jours et semaines qui viennent, pour l’occupation et contre le défrichement et l’acquisition malhonnête du bois, l’ANDRA joue à nouveau la partition du passage en force. Sous prétexte fallacieux de remise en état du Bois Lejuc, l’ANDRA prépare une expulsion violente de l’occupation du Bois Lejuc, dans les prochains jours.

Deux jours avant l’audience intentée contre les occupant-es du bois, l’arrivée rapide de plusieurs cars de gendarmes mobiles appuyés par le peloton d’intervention et de surveillance, sous commandement direct du chef d’escadron Bruno Dubois, le coup porté au nez d’une ami-e par une vigile et le retour en force de l’ANDRA dans la forêt, témoignent clairement du choix que fait l’ANDRA, une fois de plus, de fouler au pied la légalité et de porter la conflictualité sur le terrain.

En août comme aujourd’hui, nous affirmons notre détermination à faire barrage à tous travaux de l’ANDRA et à préserver coûte que coûte le Bois Lejuc des destructions que l’ANDRA ne manque d’y occasionner à chacun de ses passages ! Nous ne sommes pas dupes, replanter une poignée d’arbrisseaux quand on en a déraciné des milliers, et enlever quelques pans de murs à quelques jours de l’échéance du délai imparti pour le faire, c’est jeter de la poudre aux yeux pour mieux revenir dans un mois, ravager la forêt de plus belle ! Rendez-vous est donné le 18 février pour une grande journée d’action et de mobilisation : qu’ils expulsent ou non, nous serons dans le bois !

Les occupant-es du Bois Lejuc et opposant-es au projet de poubelle nucléaire CIGÉO !

Cartographie de la progression de l’ANDRA dans le Bois Lejuc le 23 janvier

Qu’ils nous expulsent ou pas, on sera dans le bois !

    À cette saison où les nuits s’étendent langoureusement, offrant aux claires étoiles la scène de leurs illuminations, l’ennemi rôde encore ; croit-il la forêt enfin éteinte et vulnérable ? Il s’avance à pas lourds sur le béton dur des tribunaux, il s’avance escorté de ses soldats de plombs, violant sans remords les doux rêves d’harmonie des arbres endormis. Lui, délirant, rêve d’apocalypse, de troncs broyés et de grands puits crevant les entrailles de la terre, vomissant des déchets qui jamais – au fond il le sait – ne sauront sagement rester tapis sous son déni. Mais chouettes et hiboux guettent !

L’ANDRA nous pense-t-elle engourdi-e-s ? Nous n’avons pas volé vers les contrées chaudes du sud mais vers les fraîches et vigoureuses cimes d’où nous la surveillons de plus belle !

Le 18 FÉVRIER, qu’ils nous aient expulsé-e-s ou non, montrons que nous ne sommes pas de fébriles brindilles qui s’éteignent au premier souffle, mais un grand brasier brûlant et déterminé ! Rejoignons nous par centaines à Bure pour une grande manifestation en direction du bois Lejuc, moufles et cagoules pour le froid et musique et bombes de couleur pour la joie. Que nous soyons force de réoccupation ou d’occupation, déjà venu-e-s ou primo arrivant-e-s, soyons présent-e-s et imposons aux nucléocrates notre tempo !

  • Durant la journée, des sessions d’apprentissage de grimpe seront organisées, des cabanes et barricades vont encore fleurir un peu partout au cours de chantiers collectifs – on entend même chuchoter des projets fous de châteaux fort et de tyroliennes, qui sait ? N’hésitez pas à amener des matériaux et toutes vos idées*. Nous vous invitons aussi à cadencer la lutte en apportant vos instruments de musique et de jongle !
  • Dans la soirée, arts de rue, vin chaud et concerts sont attendus en forêt. Si jamais elle est inaccessible, d’autres lieux sont prévus.

Des couchages avant et après la mobilisation sont possibles dans nos Maisons, dans les cabanes du bois, et dans des tentes que nous aménagerons pour les isoler de l’humidité et du froid. Prévoyez tout de même des vêtements et duvets aussi chauds que possible. [PLUS D’INFOS PRATIQUES ET PROGRAMME DÉTAILLÉ TRÈS BIENTÔT SUR LE SITE]

 * Les collectifs ou groupes auto-gérés peuvent s’adresser à sauvonslaforet@riseup.net pour annoncer leurs projets de construction.

Résistance et affouages !
ANDRA dégage !

Les Chouettes Hiboux de Bure

Pour tous renseignements : www.vmc.camp – sauvonslaforet@riseup.net – 03.29.45.41.77
Contact presse : 07.53.54.07.31 – automedia.bure@riseup.net

Ressources :

Les tracts en A5 recto-verso :

Tract orangeTract orange-vert , Tract orange dégradé

Les affiches en A3 :

Affiche orange , Affiche orange-vert , Affiche orange dégradé

Les affiches en A2 :

Affiche orange , Affiche orange-vert , Affiche orange dégradé

Bure, une année déter’ contre le projet CIGÉO !

[ARTICLE PUBLIÉ SUR GAZETTE DEBOUT]

 

À Bure, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on a connu une année exceptionnelle de mobilisation contre le projet d’aménagement de la plus grande poubelle nucléaire européenne. Ce sont des milliers de personnes qui, tout au long de l’année ont pour beaucoup découvert cette lutte, ont semé avec nous au printemps, ont partagé les durs et beaux moments d’un été particulièrement intense d’occupation et défense du Bois Lejuc, se sont installés sur place pour certains et reviennent fidèlement nous voir depuis, pour d’autres.

Imposer l’ineluctable

Un grand concept sociologique de l’aménagement du territoire par les grandes entreprises, c’est l’acceptabilité, ou comment faire en sorte de faire accepter l’inacceptable à la population qu’on envahit. Comme pour les soins palliatifs, on fait accepter progressivement au malade sa disparition prochaine. Après une première phase de rejet violente dans les années 90, lorsque 10000 personnes défilaient dans les rues de Bar-le-Duc et que deux tiers des habitant-es de la Meuse signaient une pétition contre l’implantation d’un « simple laboratoire d’étude » de l’Agence Nationale d’enfouissement de Déchets RAdioactifs, ou que des agriculteurs en colère enflammaient des bottes de pailles contre les grilles du chantier, est arrivée la résignation puis le fatalisme.

Durant 15 années, l’ANDRA a bénéficié d’un fort appui financier du GIP Meuse, une officine chargée d’arroser abondamment le territoire, d’acheter la bienveillance des élus locaux par un « accompagnement économique » difficile à contourner pour un territoire appauvri et désertifié après la désindustrialisation. Certains qui ont essayé ont perdu leur mairie, ont vu leurs conseillers municipaux se retourner.

En parallèle, les paysans et habitant-es de Bure et de ses environs, parfois jusqu’à quelques dizaines de kilomètres, se sont vus proposer des sommes coquettes pour le rachat de leurs terres. Et au fur et à mesure que l’ANDRA s’est constitué une réserve foncière suffisante, un troc de terre est venu accompagner les rachats : « si tu me cèdes ta terre à Bure, tu récupères un lopin à 2km et on te rajoute 30% au prix de ton ancien terrain qu’on te rachète ». Au final, ce sont 1000 hectares de terres agricoles et 2000 de forêts et autres terrains non-agricoles que l’ANDRA a mis dans son escarcelle, alors que le projet CIGEO ne dit nécessiter à ce jour que 300 hectares de surface. Cette politique d’acquisition agressive, assortie d’une menace d’expropriation future en cas de refus et de passages et appels répétés de l’ANDRA, ont eu raison de bien des gens et de leurs illusions.

Un faux débat public, fortement chahuté en 2013, et une propagande intensive dans les journaux locaux, auprès des écoliers et commerçants, ont suffi à imposer l’image de l’ineluctabilité du projet dans les consciences, en quelques années seulement. Entretemps le projet de laboratoire est devenu un projet de stockage en profondeur de déchets hautement radioactifs puis un stockage de surface de déchets faiblement et moyennement radioactifs est venu s’ajouter au tout. Bref, la pilule est amère pour la Meuse, qui depuis longtemps est déjà l’enfant pauvre, méprisé et désertifié de la Lorraine. Si on ajoute à cela les a prioris à l’encontre de la région, qui voient en elle un terrain argileux, caillouteux de champ à perte de vue, quelconque et sans charme, il n’en faut pas plus pour qu’une entreprise comme l’ANDRA puisse creuser son nid paisiblement dans une indifférence générale.

Carte distribuée à l’entrée de la World Nuclear Exhibition 2014 à Paris

Seulement, aujourd’hui il ne s’agit plus seulement d’enterrer les déchets gênants de plusieurs décennies d’incurie de la filière nucléaire, d’abord massivement jetés dans les eaux internationales au large de la Somalie, puis stockés dans le permafrost sibérien ou dans des piscines saturées à la Hague. Avec la faillite récente d’Areva, son incompétence avérée dans les projets de centrales EPR à Flamanville et en Finlance ou encore dans la dépollution de Tchernobyl, avec l’arrivée en fin de vie de 17 centrales nucléaires en France, c’est toute la filière nucléaire qui a du plomb dans l’aile.

Quoi de plus opportun qu’un territoire peu peuplé et dévalorisé comme la Meuse, qu’on pourrait transformer en vitrine de l’industrie nucléaire en y implantant un « pôle de compétence », une sorte de Silicon Valley nucléarisée ? Un projet de retraitement de déchets nucléaires à Gudmont-Villiers porté par Derichebourg, une blanchisserie d’habits du nucléaire à Joinville, une usine de montage de pièces de centrales à St Dizier, une autre à Velaines : la colonisation nucléaire du territoire est en marche, à l’insu de ses habitant-es, bien entendu ! La consultation publique n’est généralement qu’un moment de présentation de décisions et projets déjà bien ficelés et actés dans les coulisses parisiennes.

Acceptabilité rime avec ineluctabilité : comme à Sivens, on mise sur le mal déjà fait pour atteindre le point de non-retour, celui des dégâts déjà irréversibles. Ironique, quand on pense que CIGÉO s’appuie entièrement sur une loi votée par 20 députés le 11 juillet dernier au parlement et qui stipule que l’enfouissement est réalisable à la condition qu’on puisse l’interrompre, rendre réversible le processus n »importe quand durant les 140 années qu’est censée durer l’exploitation. Mais réversible ne veut pas dire récupérable : en Allemagne, la mine d’Asse peut en témoigner, les fûts gisent dans le sel des mines, corrodés, et libèrent leur radiations sans qu’on sache comment y remédier. La stratégie de l’ANDRA et de ses collègues atomisés est de bâtir le plus vite possible, le plus possible, pour que surtout on ne se rende pas compte assez tôt qu’au-delà des coûts faramineux, les moyens techniques et scientifiques d’assurer le principe de précaution le plus élémentaire, ne sont pas remplis.

Enraciner la résistance

C’est ainsi qu’on s’affranchit de la légalité pour ratiboiser une forêt bien mal acquise, en 2015 lors d’un conseil municipal organisé à 6h du matin, à l’insu des habitant-es du village de Mandres. 84 forages dans le Bois Lejuc justifient qu’en juin 2016 on défriche 8 hectares, qu’on érige une clôture sur 3 km, sous surveillance de vigiles armés de manches de pioches, boucliers et casques.

Pour un projet qui doit encore obtenir son autorisation de création en 2018 et ne dispose par conséquent pas encore du label magique de l’utilité publique (le droit de dénaturer un territoire en profondeur sous prétexte de nécessité publique), CIGÉO est déjà bien implanté. Ce ne sont pas des « travaux préliminaires », bien entendu, ce ne sont que des sondages géologiques destinés à établir la faisabilité du projet. En attendant, la forêt est rasée sur 11 hectares, un remblais de 30 cm est déposé sur un chemin de ronde de 3 km et de 10 à 15 mètres de large et l’ANDRA affirme que tout est amovible.

Que reste-t-il comme recours quand une forêt disparaît à vue d’oeil, excepté celui de se placer entre la machine et ce qu’elle prétend détruire ? Mi-juin le Bois Lejuc est occupé par 250 personnes, une soixantaine de personnes l’occupe durant 3 semaines avant qu’une expulsion violente par les forces de l’ordre ne permette à l’ANDRA de revenir en force. Un mur de 2 mètres en béton et prévu sur 3km est érigé en « protection » contre les hordes violentes d’empêcheurs de déboiser en rond. Il faudra attendre le 1er août et une destruction importante de la forêt, malgré une réoccupation partielle de celle-ci mi-juillet, pour qu’une décision de justice ne déclare le défrichement illégal et ne suspende les travaux. Ce n’est que deux semaines plus tard, après moultes actions menées contre les sous-traitants, en lisière de forêt, devant le laboratoire, entre humour et offensivité, rires et colère, légalité et clandestinité, projectiles et farces, que les gendarmes mobiles et vigiles se retirent, livrant le bois à notre joyeuse détermination.

400 personnes détruisent le mur, le couvrent de centaines de slogans drôles, puissants, beaux et révolutionnaires. « Le mur de Bure est tombé« , le mot circule partout en France, les vidéos et images fusent sur les réseaux sociaux, par sms et sur les sites internet. La presse nationale elle-même est momentanément captée, se déplaçant jusqu’à Bure pour assister à la joyeuse débourrade du mur. Libération titre « La faillite du nucléaire » un dossier de quatre page qui dresse un sévère bilan de la débâcle de l’industrie nucléaire, d’autres médias suivent, Bure sort de son anonymat comme jamais en 20 ans : 1,6 millions d’euros de sabotage ça ne passe pas inaperçu !

L’été d’urgence décrété à Bure en juin a porté ses fruits : des centaines de personnes sont venues tout au long des deux mois qui ont suivi. La forêt, la Maison de la Résistance et le terrain de la gare de Luméville, lieux d’organisation et d’accueil de la lutte, n’ont pas désempli, habités par une furieuse et joyeuse détermination, un puissant et contagieux vent de résistance. Une forte solidarité financière et une belle autogestion, parfois un peu chaotique, ont fait des merveilles : dépassés par une mobilisation au-delà de nos espérances, nous avons en revanche grandement amélioré les possibilités offertes à la lutte sur place.

Habiter sans s’imposer

Depuis plusieurs années, les volontaires de la Maison de la Résistance ont vu certains d’entre eux s’installer aux environs et drainer à Bure des solidarités qui ont peu à peu contribué à tisser un réseau de soutiens militants, agricoles, artistiques, logistiques à 10, 30 ou 60 kilomètres. Ces soutiens précieux permettent depuis plusieurs années d’organiser des festivals, des manifestations qui rassemblent régulièrement jusqu’à un millier de personnes.

Ce réseau et ceux qui sont venus s’ajouter suite au campement anti-autoritaire d’août 2015, ont grandement contribué au succès des mobilisations de cet été : une alchimie précieuse entre des mois et années de travail de terrain et une forte proximité avec de nombreux réseaux de lutte sociales, antinucléaires, environnementales, de territoires, en villes comme ailleurs.

Une dynamique agricole s’est engagée dès l’été 2015, avec des rencontres entre paysans de Notre-Dame-des-Landes et Bure, et qui s’est poursuivie à l’automne avec des semis de pommes de terre, dans les champs laissés en friche par l’ANDRA. Cet automne-ci deux nouveaux hectares ont été labourés avec la complicité de nos amis paysans locaux, une rencontre et formation nationale du réseau européen Reclaim The Fields s’est tenue à la maison de la résistance en novembre, et d’autres projets fleurissent déjà pour ne pas seulement occuper mais également habiter Bure et ses environs.

Face à un projet qui s’impose par la force, qui peu à peu supprime à un territoire son histoire pour réécrire la sienne, nous voulons au contraire l’habiter, nous laisser habiter par lui et par ceux qui y vivent et vivaient avant nous. Nous avons entrepris d’en recueillir les mémoires à travers les récits de ses grands-mères et pères. Un journal que nous éditons, le Couarail, reprend son appelation à l’histoire de la Lorraine : une rencontre sur le seuil, pour discuter de tout mais surtout pas de rien. Comme les praesidio du No Tav, le Couarail c’est le lien social que l’ANDRA brise savamment en dressant les habitant-es les un-es contre les autres. Nous ne prétendons pas le reconstruire, mais simplement le faire exister entre nous et celles et ceux qui nous acceptent et nous apportent autant que nous espérons leur apporter en luttant non pas pour eux mais avec eux.

Bientôt deux nouvelles maisons permettront d’accueillir celles et ceux parmi nous qui se sont installé-es à Bure à la fin de l’été et depuis quelques mois. Des projets de bibliothèque, d’université populaire, de chorale, de four à pain et bien d’autres choses émergent déjà à travers des commissions qui se multiplient. Un groupement d’achat se prépare pour acheter collectivement et localement légumes et sec que nous finançons déjà avec une partie de nos finances mises en commun. Entre forêt, maison et terrain de la gare, une assemblée dite « des gravitant-es », celles et ceux qui vivent, vont, viennent et gravitent autour de Bure, détermine chaque semaine agenda, dépenses, aspects de la vie collective, projets, etc. Une commission juridique porte nos attaques contre le projet, une autre anti-répression nous défend des attaques pénales que nous subissons en réponse à nos actions. L’automédia répartit les responsabilités de la parole publique, de la communication écrite, orale, radio, vidéo, photo entre nous tout-es, selon les jours et les sensibilités. Des chantiers publics et collectifs de travaux nombreux se préparent et s’échelonneront tout au long de l’année à venir.

Si l’année passée était placée sous le signe de la spontanéité, celle à venir le sera, nous l’espérons, sous celui de la construction et de la résistance : vivre et lutter dans un même élan !

 

John, pour l’automédia de Bure

automedia.bure@riseup.net

 

 

Jeudi 1er décembre – La fête de l’éco-enfouissemement continue!

La contre-attaque médiatique de l’ANDRA se poursuit avec la régularité d’un métronome. Après le début de « reboisement » du bois Lejuc le 30 novembre : une réunion de concertation pour « les milieux naturels et la biodiversité » le 1er décembre. Eteindront-ils enfin demain les hideuses lumières de leur laboratoire pour être plus éco-citoyens? On ne peut que le souhaiter.

En attendant, heureusement, des hibous veillent…

 

Opération « haie d’honneur » pour la consultation – étape 1 !

photo3Des nouvelles fraîches de la biodiversité à Bure ! On a signalé ce matin dans l’écosystème meusien la présence de quelques hibous forts déçus de ne pas avoir été invités à une « concertation » organisée par l’ANDRA avec les « acteurs du territoire » en vue de l’étude d’impact globale de la poubelle nucléaire. C’est dommage, ils avaient pourtant quelques idées sur la question…

C’est donc pour réparer cette injustice qu’un défilé bariolé s’est mis en route à 13h40 vers la salle des fêtes de Bure, puis vers l’espace technologique du labo, où des nucléocrates à court d’idées retorses avaient déplacé leur réunion en catimini. Le cortège arrive malgré tout assez tôt à destination pour accueillir les participants et leur rappeler en musique avec qui ils allaient se « concerter ». Leur tract précisait : « les prétendues consultations ne sont qu’un autre des rouages d’une stratégie de communication à grande échelle. Comme pour le débat public de 2013, tout est ficelé d’avance. »photo2

 

Opération « haie d’horreur » pour le greenwashing – étape 1bis !

Après la consultation, la fête de l’éco-enfouissement se poursuit au nord du bois Lejuc. Comme hier, le tracteur, flanqué de quelques gendarmes, d’Emmanuel Hance et de ses vigiles, trace son sillon infernal. La scène est surréaliste : à quelques centimètres des souches des arbres abattus quelques mois plus tôt, on prépare la plantations de quelques dérisoires arbrissimg_20161201_145747eaux. Pourtant, nul besoin de préciser que, si rien n’est fait, c’est une portion encore plus grande du bois qui sera de nouveau rasée pour construire la zone des puits de ventilation. Mais peut-être que, là encore, on assistera au spectacle absurde d’un tracteur creusant des sillons sur un désert pour y replanter quelques arbrisseaux : c’est ça l’esprit de la réversibilité façon Cigéo.

 

Face à cette absurdité, une évidence s’empare des hibous : une haie d’arbre morts, une « haie d’horreur » pour une mascarade de reboisement, une rangée de branches sans vie pour rappeler que l’Andra a déjà massacré le bois et le massacrera encore. L’insolence de ce greenwashing vire au sinistre, mais les hibous choisissent encore une fois la dérision : c’est encore en musique et dans la joie de lutter ensemble que se déroule cette parodie de reboisement. L’esprit de l’été revient sur les hibous.

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La future zone des puits (selon eux), largement défrichée…

 

Vite, l’étape 2 pour un hiver déter’ !

Devant nous, encore au moins 12 jours de pépiniériste reboisant ce qui a été déboisé pour mieux redéboiser plus tard, encore des réunions de concertation fantoches, et bientôt l’anniversaire de Sven Lindstroem dans la forêt. Il y aura l’étape 2, et les autres suivront. L’hiver s’annonce déter’ mais on a besoin de monde!

On ne nous éco-enfouira pas.

On ne nous atomisera jamais.

 

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Les pancartes présentées devant l’entrée de l’ANDRA aux participants à la réunion de concertation :

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Mercredi 30 novembre – La fête de l’éco-enfouissement a commencé !

Mercredi 30 novembre après-midi, l’Andra, Hance, ses vigiles et le petit prince Dubois, sont venus dans le bois, pas pour nous serrer la pince. Ni pour poursuivre des travaux de déboisements, ou même de sondages géotechniques. Non : pour faire des travaux de « reboisement ».

Car il est clair que l’agence agit maintenant « dans les clous ». C’en est fini des attitudes m’as-tu-vu de cet été, à coups de défrichements illégaux, de coups de lattes des vigiles, de militarisation énorme du territoire. Qu’on se le tienne pour le dit, l’Andra et la « justice », ça fait un !

Donc, ce fameux reboisement permet à l’Andra de remplir ses obligations vis-à-vis des tribunaux, conformément à la décision du TGI du 1er août enjoignant l’Andra à obtenir l’autorisation de défrichement dans un délai de 6 mois, ou remettre en état les zones défrichées. L’agence est en cours pour l’autorisation. Et là, elle commence donc à reboiser….pour mieux pouvoir revenir complètement dans la forêt sous peu et continuer ses travaux dégueus.

À 14h30 donc, à l’entrée nord du bois Lejuc (accès Ribeaucourt), Hance, flanqué de 3 vigiles est arrivé – après que deux véhicules de flics sont venus vérifier le terrain un peu plus tôt, certains posant tranquillement en treillis militaire, boucliers etc. De quoi reposer une ambiance très sympathique. Les cerbères attendent, sans que le beau soleil d’hiver semblent aller plus loin qu’effleurer leur crâne sans y faire rentrer de lumière. Pendant ce temps-là, trois véhicules de gendarme mettent un coup de pression à l’entrée sud.

À 16h, l’objet de l’attente paraît : un tracteur, flanqué à nouveau d’un pick-up de vigiles. La machine est munie d’une roue dentée qui peut creuser des sillons.

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Un reboisement tout en douceur.

  De 16h à 17h30, le tracteur, vaguement protégé par les vigiles, va tracer 2 sillons de 15-20 cm sur environ 100 m, sous la direction de Emmanuel Hance, qui, quand il ne pousse pas les agriculteurs à bout ou au cancer pour récupérer leurs terres, ou quand sa maison n’est pas crottée, endosse volontiers le rôle de chef de chantier. La roue trace ses sillons, en passant proche de quelques souches. Drôle de manière de reboiser.

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Emmanuel Hance, aux « manettes » du reboisement.

À 16h45, 4 véhicules de gendarmerie débarquent, avec le commandant Dubois à leur tête. Le tableau de famille était ainsi complet. On se croirait ramené 3 mois et demi en arrière, avec vingt degrés et 4 heure de jours en moins.

Une dizaine de hiboux du bois étaient là pour observer et prendre acte de leur retour. À 17h45 les véhicules repartent dans la nuit tombante.

Le même manège est, a priori, censé se répéter pendant les 15 jours. Le 15 décembre une des audiences de l’appel de l’Andra sur le jugement du 1er août aura lieu. Les coups de pression et les patrouilles de flics risquent de se renforcer encore. Tout ça pour nous mettre à bout et expulser ensuite la forêt tranquillement ?

Ça ne se passera pas comme ça ! Même en hiver, les hiboux restent déters !

Avec l’Andra, la novlangue devient réalité : la destruction de la forêt, c’est son reboisement !

Les prochaines dates de la fête de l’éco-enfouissement :

– Tous les jours à venir, en lisière du bois, surveillance et présence auprès de leurs travaux en lisière.

Jeudi 1er décembre, à 14h, salle des fêtes de Bure, « haie d’honneur » pour la réunion d’enfumage « Ateliers biodiversité et milieux naturels ».

Vendredi 2 décembre à 19h, assemblée stratégique autour de la forêt à la Maison de résistance à la poubelle nucléaire.

Sam 17 Septembre – Une nouvelle assemblée de lutte !

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Après ce fol été, il est important de toutes et tous se revoir pour faire le point sur la lutte et tracer les perspectives à venir .. Le mur du Bois Lejuc tombé, restons aux aguets des agissement de l’ANDRA et des travaux à venir ..

“C’est une Assemblée pour toutes et tous, habitant-e-s des environs, ami-e-s de plus loin, associations en lutte, toutes les personnes qui se sentent concernées et souhaitent se renseigner, prêter main forte ! … Soyons nombreus-e-s à montrer notre détermination. Nous avons besoin de nous voir pour être plus fort-e-s, nous connaître, se nourrir du travail des un-e-s et des autres.

Cette assemblée nous appartient à tout-e-s, faisons-la vivre !”

RDV à 14h à l’ancienne gare de Luméville à côté du préau ou s’il pleut à la maison de résistance à Bure.

Jeudi matin, les parlementeurs, Dubois et sa bleusaille… … sont venus chez nous pour se faire de la maille

En Australie du Sud, le gouvernement étudie un projet visant à construire la plus grande décharge de déchets nucléaires de faible intensité dans le monde.

En cette fin d ‘été, une délégation majoritairement pro-nucléaire de six membres des chambres haute et basse Australiennes en tournée mondiale pour une enquête parlementaire sur la gestion des déchets nucléaires se sont arrêtés dans le sud meusien. Leur objectif, enquêter quant au bien-fondé des installations de l’Andra sur la commune de Bure.

Au sein de cette délégation, Mark Parnell, un membre du parti  »The Green » a souhaité rencontrer de façon informelle les opposants au projet Cigeo. C’est donc au cours d’une balade dans le bois Lejuc, que nous avons pu échanger autour des différents sites d’enfouissement dans le monde mais aussi sur la situation locale et la manière mafieuse dont s’est opéré l’échange du bois communal il y a un an, à l’encontre de la volonté d’une majorité d’habitants de Mandres-en-Barrois.

Tôt ce matin, une délégation unanimement anti-nucléaire de 20 membres a marché en direction du laboratoire de l’Andra. Leur objectif, saluer comme il se doit la venue de ces nucléocrates australiens.

Il faut somme toute rappeler qu’hier après midi, un convoi identique (personnes vêtues de combinaisons blanches, clown policier et sono mobile) s’était rendu devant l’hôtel restaurant de l’Andra alors que la délégation était retenue à Paris. Escorté par la police sous la houlette du commandant Dubois, l’action s’était soldée par un goûter bien mérité.

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Ce matin, donc, rendez-vous était donné sur le parking du même restaurant à 09h00 pétantes. Au même moment, les députés australiens s’apprêtaient à rentrer dans le minibus qui leur était mis à disposition par l’Andra pour effectuer les 200 mètres séparant l’hôtel du laboratoire. Banderole déployée au message explicite : « DON’T DUMP THE TERITORY ! NOT IN WALLERBERDINA, NOR IN BURE, NOR ANYWHERE », les nucléocrates s’attardent un court moment puis rentrent dans le véhicule. Marche-arrière enclenchée, la banderole est plaquée contre le minibus, empêchant ainsi leur départ. Décision est prise après une dizaine de minutes de les escorter jusqu’aux portes de l’enfer l’Andra. Aucune présence policière. Dix minutes seront nécessaires pour parcourir les 200 mètres. Devant le portail du laboratoire, les grilles resteront fermées. Impossible pour la délégation d’entrer. Nous en profitroll pour prendre moult photos. Le minibus, après plusieurs manœuvres, finit par repartir en direction de l’espace technologique. Nous les laissons-là pour repartir en convoi de notre côté.

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Il est à noter que durant ce week-end de milieu de semaine, beaucoup de gendarmes étaient présents dans le secteur. Ce matin encore, quatre véhicules et vingt gendarmes étaient rassemblés devant la mairie de Bure, voisine de la maison de Résistance.

A Bure, l’été d’urgence ne se termine jamais

Que faire des déchets nucléaires ?

« Mais vous, vous proposez quoi ? »

 

Fatalement, deux fois sur trois, lorsqu’on dit qu’on s’oppose au stockage des déchets nucléaires à Bure, on nous oppose la question « mais quelle alternative vous proposez ? ».

Face à 70 ans de faillite dans la gestion des déchets nucléaires de la part de tous les pays producteurs de nucléaire, il faudrait que nous, opposant.es, nous ayons une alternative immédiate à proposer pour être légitimes dans la critique de l’enfouissement à Bure, selon la rengaine « on ne condamne pas si on a rien d’autre à proposer » …

En la matière, pour une industrie nucléaire qui génère des déchets toxiques pour des centaines de milliers d’années et dont les accidents peuvent brutalement mettre en danger la vie de millions de personnes ; pour une science atomique dont la mise en pratique concrète est intervenue il y a 70 ans, avant même qu’on en connaisse réellement les conséquences physiques et biologiques, avec les circonstances dramatiques qu’on connaît (Hiroshima) , la sagesse la plus élémentaire nous commande humilité et prudence dans nos réponses.

nucleaire icebergNon, nous n’avons et ne pourrons pas proposer de solutions miracles, parce que les études et les connaissances qu’il faudrait raisonnablement cumuler sur le nucléaire dépassent nos vies humaines. Parce que l’irrémédiable est déjà en cours et que chaque jour le nucléaire nous entraîne davantage dans sa fuite en avant. Fruit d’un système économique capitaliste qui recherche un profit et une croissance rapide, le nucléaire s’est construit et imposé sur une longue suite de mensonges d’États pour des besoins énergétiques d’une industrialisation galopante. Depuis le projet Manhattan qui a utilisé les drames d’Hiroshima et Nagasaki pour démontrer la puissance de l’énergie nucléaire, en vue d’un usage civil ; en passant par l’occultation systématique des études physiologiques sur les populations riveraines des essais et accidents nucléaires ; ou encore avec la pollution découlant de l’immersion, par de nombreux pays et durant plusieurs décennies, de fûts de déchets nucléaires et toxiques dans les eaux somaliennes, et envoyés maintenant dans le permafrost sibérien ; l’industrie nucléaire n’est qu’une longue suite de décisions arbitraires, d’erreurs cumulées et maquillées sous le sceau « confidentiel ». Le bilan quant à lui est effroyable : des millions de leucémies et cancers, de décès et des zones géographiques devenues impropres à la vie et à l’agriculture pour des centaines d’années.

« Énergie propre », « Vitrification pour des dizaines d’années », « Aérations souterraines sans fuites en surface » « Langage pour avertir les générations futures des lieux d’enfouissement », sont autant d’approximations scientifiques et d’affirmations politiques qui peinent à masquer la faillite économique (celle d’AREVA notamment) et l’incurie scientifique1 auxquelles les gouvernements doivent faire face, avec le lourd héritage de décennies d’inconséquence de la politique nucléaire. Et plutôt que de tout remettre à plat à partir de ce constat et de repenser entièrement la politique énergétique, de mettre en suspens toute la production nucléaire sans délais et de redimensionner la consommation électrique en conséquence, on entretient un système qui consomme et consume l’avenir.

Le fatalisme sur lequel s’appuie le lobby nucléaire réside beaucoup dans son affirmation que nulle alternative ne saurait aujourd’hui sérieusement prendre le relais de l’atome dans la production, quitte à occulter pour cela les études sur les énergies renouvelables. C’est substituer l’effet à la cause : il s’agit bien ici d’interroger les politiques en matière d’énergies, de questionner la surconsommation et non le rendement énergétique.

biocarburant-chapatteEt il ne s’agit pas, entendons-nous bien, de faire acheter à chacun.e des ampoules basse consommation tandis qu’on multiplie à l’infini les appareillages électroniques à domicile, mais bien de réfréner drastiquement les industries dans leur production et leur consommation. Des millions d’hectares de serveurs informatiques nourrissent les appétits insatiables des géants du datamining, facebook, google, etc. qui n’imposent plus aucune limite dans les stockages de données ; les éclairages urbains privés, publicitaires et publics se démultiplient à l’infini pour des raisons esthétiques et commerciales, tandis que dans le même temps on fait assaut d’inventivité pour élaborer des éco-labels et normes d’haute qualité environnementale. La tendance va tout à l’inverse d’une sobriété énergétique, c’est une véritable débauche consumériste, dans un univers de constante et omniprésente interconnexion entre les individus et au sein d’une économie mondialisée. Il faudrait questionner avant tout ce modèle économique et social qui dissocie rendement et loisirs de leurs coûts énergétiques.

Mais que faire des déchets ? Arrêter d’en produire ? Et ceux déjà produits ?

 

centrales-nucleaires-60ansLa sueur froide de l’industrie nucléaire et des gouvernements , intimement liés dans le mensonge, c’est la fin de vie de la première génération de centrales nucléaires. Ces vieux dinosaures comme Fessenheim, qui accumulent les incidents techniques, et qui devraient déjà être au rebus mais qui n’ont pas encore trouvé de remplaçants. Des milliers de tonnes de déchets hautement radioactifs issus du démantèlement qui obstruent la file d’attente. La nouvelle génération de réacteurs EPR attend son tour, mais est déjà mal engagée : à Flamanville aussi bien qu’à Olkiluoto (Finlande) on multiplie les incidents de chantiers, les erreurs de conception pour des réacteurs dont le rendement n’est pas démontré mais la dangerosité réelle.

Il faudrait donc remiser rapidement les anciens coucous, pour pouvoir passer à la suite et justifier des décennies d’investissement, plus que coûteux, d’argent public. « The show must go on ! ». Et pour que le show se poursuive, qu’on puisse continuer à vendre des EPR à la Chine, promouvoir un nucléaire civil auprès de tous les « pays émergents », et prétendre renflouer ainsi les caisses très déficitaires de l’énergie atomique, il faut montrer qu’on sait aussi gérer les déchets.

dessin_aurel-9897cC’est là que CIGÉO, le WIPP, le projet d’Onkalo en Finlande, celui en Ontario ou encore en Australie du sud, interviennent : des trous dans lesquels on pourra jeter tout le passé et les déchets futurs, en attendant de trouver une solution hypothétique miracle d’ici 100 ou 150 ans. On plaque quelques garanties vitrifiées par-dessus pour rassurer tout le monde avec des milliers de pages de spéculations scientifiques, et le tour est joué ! Les politiciens peuvent ainsi faire passer la pilule et voter une loi de réversibilité factice par un hémicycle au 3/4 vide, sans qu’on ait besoin de produire aucune garantie technique de faisabilité de cette réversibilité : aujourd’hui on ne dispose pas réellement des moyens de ressortir les colis des galeries si on devait le faire à court terme. C’est le château de cartes syllogistique du nucléaire : si on a l’autorisation c’est qu’on a toutes les garanties et si on a toutes les garanties, ça veut dire qu’on peut continuer à donner des autorisations ou, comme pour le Bois Lejuc à Bure, se sentir assez de légitimité et d’impunité pour s’en passer. Le tout c’est de plaquer dessus un vernis d’acceptabilité sociale2 : d’une part la commission nationale du débat public (CNDP) aménage une consultation publique illusoire tandis qu’en arrière plan on achète massivement le silence des élus à grands renforts de services rendus (parties de chasse dans les bois nouvellement acquis) et de cachets d’argent public du GIP Meuse ou Haute-Marne, et qu’on crée l’omerta par la pressurisation, l’intimidation et la menace habilement orchestrées envers les propriétaires dont on a besoin des terrains pour construire le futur projet. En 15 ans on arrive ainsi à extorquer 3000 hectares de terrain, à réduire toute une population au sentiment de résignation et d’impuissance et à mettre sous coupe tous les conseils municipaux, après avoir écarté habilement les détracteurs. L’acceptabilité c’est les soins palliatifs pour un territoire mis à l’agonie dans la phase préliminaire du projet, c’est faire assimiler la mort de l’espoir, l’irrémédiable, à tout un village, un département, une région …

Que faire alors, si les déchets irradient dans les piscines de la Hague, et qu’il faut arrêter les centrales ? Peut-être, a minima, les laisser et les traiter sur les sites irradiés, là où on a déjà profondément pollué l’environnement, et arrêter de les déplacer partout, de polluer ainsi encore plus l’air pour des solutions hypothétiques. Et surtout, arrêter d’en produire afin d’avoir le recul nécessaire à une recherche réelle et sereine de solutions. Et non un pis-aller qui permette de maintenir la production mais qui repousse le problème, empiré, à la génération suivante.

nucleaire_En tous cas on ne peut décemment pas prendre au sérieux des solutions qui évoluent en temps réel, qui s’appuient sur des expériences désastreuses récentes, qui font l’objet d’une communication opaque et qui sont proposées par des organismes avec une politique aussi mafieuse que L’ANDRA dans la Meuse. Nous ne pouvons pas prendre le risque que les nappes phréatiques qui s’étendent bien au-delà de la Meuse soient polluées et impropres à tout usage, voire qu’elles conduisent à un monstrueux écocide. Tout ça parce que des scientifiques et politiciens inconséquents et vénaux du début du 21ème siècle, soucieux de préserver la continuité d’une industrie faillitaire, auront joué aux apprentis sorciers.

En vérité personne n’a de solutions, ni vous, ni nous, ni eux ! Et lorsqu’on a pas de solutions, on arrête les frais, on se pose et on réfléchit à la réponse. Sinon on continue à accumuler les erreurs et on accentue le problème qu’on prétend résoudre. Arrêt immédiat et total du nucléaire !

1 Incendie au WIPP (USA), pollution des eaux et de l’air autour de la Hague (France), fusion du réacteur de Fukushima (Japon), impossibilité de récupérer les fûts dans la mine d’Asse (Allemagne), incidents répétés dans des centrales nucléaires vieillissantes, etc.) Sur le sujet, voir l’interview sur France Culture de Monique Sené, physicienne nucléaire.

2 Voir le film Poubelle la vie à ce sujet.