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Communiqué de presse des équipes médicale et juridique du mouvement d’occupation du Bois Lejuc sur les violences subies par les manifestant.e.s

Dimanche 17 juillet 2016, Bure.

Ce samedi 16 juillet 2016, des habitant.e.s, des paysann.e.s, des militant.e.s, des familles et des soutiens internationaux, ont participé à la manifestation de réoccupation de la forêt de Mandres-en-Barrois. Ce bois tricentenaire, ayant déjà subi les dégâts causés par les premiers travaux illégaux de l’ ANDRA, est voué à disparaître pour laisser place au projet insensé d’enfouissement des déchets nucléaire CIGEO.

Ce cortège d’au moins 400 personnes, unies par le désir de défendre ce bois et d’empêcher la poursuite de ce projet et de ces travaux illégaux, a convergé vers la forêt. Cette manifestation joyeuse et déterminée s’est achevée par un grand repas et par une nuit au sein du bois Lejuc.

Au lendemain de cet événement, les équipes médicale et juridique du mouvement, ayant pris en charge les personnes blessées et recueilli de nombreux témoignages, en tirent un constat alarmant.

Tout au long de la journée du 16 juillet, les participant.e.s ont rapporté les innombrables agressions commises par le service de sécurité privé de l’ANDRA. Equipés de boucliers transparents, de casques, de matraques, de sprays lacrymogènes, de manches de pioches et de frondes, ces soi-disant « vigiles » chargés de la sécurisation du site se sont en réalité constitués en une véritable milice mobile, allant au contact et pourchassant dans les champs et dans les bois les manifestant.e.s pour les passer à tabac et voler leurs affaires. (suite…)

Pourquoi nous réoccupons le bois Lejuc ?

Pourquoi nous réoccupons le bois Lejuc ?

C’est l’histoire d’un territoire colonisé depuis 20 ans par la mafia nucléaire, son argent facile, ses façades ravalées, ses jolis lampadaires et ses vigiles patibulaires, ses caméras et ses visites scolaires, sa fabrique de la résignation et du consentement mou, ses morts de chantiers, sa catastrophe à petite dose.

C’est l’histoire d’un projet qui, sous couvert de « rendre service aux générations futures », organise et pérennise la dépendance à une filière moribonde, creuse des trous interminables pour une accumulation de déchets interminable.

C’est l’histoire d’une lutte de plus de 30 ans, ici, ailleurs, contre l’implantation d’une poubelle nucléaire, combat qui sinue de lieux en lieux, refus assumés, massifs, à coup de manifs monstres, de foules en colère, de goudron et de plumes contre l’ANDRA.

C’est l’histoire d’une forêt occupée et, pour la première fois en 20 ans, d’un lieu libéré du joug de l’ANDRA et de ses travaux, l’histoire de la possibilité, même fugace, d’une prise contre un ennemi partout insaisissable et inatteignable.

C’est l’histoire d’une agence qui, sous couvert de « projet de territoire » ou « d’intégration territoriale », organise l’occupation policière, la surveillance diffuse et la paranoïa des habitant-e-s. Le projet dingue, inédit, prométhéen, sur des centaines d’années, de la reconfiguration (suite…)

Communiqué de presse (16 juillet à 16h00) – On a repris la forêt! On ne nous atomisera jamais!

Samedi 16 juillet, plus de 350 personnes de tous les âges et tous les horizons sont entrées dans le Bois Lejuc, à Mandres-en-Barrois et viennent de le libérer une nouvelle fois de l’emprise de l’Andra.

Des paysans sont sur place avec leurs tracteurs, des enfants se promènent dans le bois, une cantine vient de s’installer, des chaînes humaines se forment pour acheminer le matériel tandis que l’accordéon commence à jouer.Les occupants se réjouissent du succès de cette action, qui a largement rassemblé les différentes composantes du mouvement contre Cigéo.Ils dénoncent toutefois une attaque violente menée par la milice privée de l’Andra lors de son repli sur des militants assis à terre. Voilà les méthodes de l’Andra pour imposer Cigéo !

Les occupants appellent à rejoindre massivement le bois libéré dès ce soir, demain et dans les jours à venir!

Cette occupation-libération pour empêcher la progression des travaux de l’Andra se situe dans le prolongement de 20 ans de lutte contre Cigéo. C’est une nouvelle étape déterminante dans la résistance contre le rouleau compresseur de l’Andra qui veut imposer Cigéo par la force.

 

Infos : vmc.camp/fil-info  / vmc.camp / burestop.eu / burezonelibre.noblogs.org

Contact : sauvonslaforet@riseup.net    /  Tel (médias) 07 58 65 48 89    Tel (infos relais urgence) 07 58 13 18 61

16 juillet : Manif de réoccupation !

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Samedi 16 Juillet, on reprend la forêt !

Ils ont donc envoyé les casqués par dizaines. On les a vu poindre à l’horizon peu avant six heures du matin, jeudi 7 juillet. Les gendarmes mobiles, les fourgons, les tracteurs, les bulldozers, les poids-lourds, les hélicoptères. Ô sinistre parade venue nous déloger !

Depuis le 19 juin, collectifs, associations, habitant.e.s en résistance, paysan.e.s vivaient dans et avec la forêt libérée de Mandres-en-Barrois en construisant des lieux de vie là où l’ANDRA a déboisé.

Alors que les nucléocrates ont légalisé le cimetière atomique à l’Assemblée Nationale depuis le 11 juillet, nous, nous avons occupé joyeusement leur plateforme déboisée, symbole du début des travaux de CIGEO.

Ce front contre l’empire nucléaire, brèche fragile, a été ouvert et tenu de diverses manières : sabotages, pique-nique, occupations, actions juridiques et le ralliement de plus de quatre-vingt d’associations en quelques jours. Tout ceci a enrayé la machine de l’ANDRA pendant plus de 3 semaines, jusqu’à la pousser à employer la force.

Cette expulsion ne signe en rien une défaite. Elle renforce plutôt notre légitimité, notre colère et notre détermination. Il est hors de question de leur laisser ce bois stratégique. Que la police y traîne ses bottes à longueur de journée, que les vigiles-mercenaires de l’ANDRA reprennent leurs rondes, qu’ils redémarrent leurs travaux insupportables.

Le week-end du 16 et 17 juillet 2016, nous avions convoqué, sous les charmes et les hêtres du bois, des « Barricades antinucléaires mondiales et improvisées ». Il est urgent d’être ambitieux.ses et réalistes comme nous avons su l’être jusqu’ici. Ces rencontres auront donc lieu. Et elles auront lieu DANS LA FORÊT ! Une fois encore, notre seule limite c’est le nombre. Rejoignez-nous ! (suite…)

Expulsion de la forêt occupée – Le suivi de la journée

BURE_Lejuc-5Page helloasso, pour nous aider financièrement !

L’appel à matos, pour aider matériellement !

7 JUILLET : ALERTE ROUGE EXPULSION A BURE  !!!!! Cette fois c’est pour de bon !! Besoin de soutiens massifs sur place, RDV à Bure puis ré-orientation en fonction de la situation !! Tels infos : 0758654889 et 0758131861.

  • 6h : ENORME convoi de CRS et de gendarmes mobiles suréquipés en direction de Mandres, un véhicule bulldozer aurait été vu. Pas d’infos précises sur le nombre exact de fourgons pour l’instant mais apparemment dispositif énorme
  • 6h30 : Entrée côté bois de Mandres bouclée, pas d’infos sur la situation à l’entrée Ribeaucourt pour l’instant. Sur place tout le monde est réveillé et s’organise.
  • 6h30 : Les deux routes d’accès depuis le village de Mandres sont bloquées au niveau des carrefours et des exploitations agricoles par plusieurs véhicules de gendarmerie. En contre-bas du village de bure il y a aussi quelques fourgons qui, visiblement empêchent le passage (à reconfirmer).
  • 6h45 : Une demie-heure que les casqués sont là, l’assault a commencé ! La charge a été ultra rapide, aucune volonté de temporisation. Après première sommation et une deuxième sommation ultra-rapide ils ont commencé à avancer, le dispositif est visiblement énorme. Le tracteur a l’entrée a pu sortir, les occupant-e-s reculent progressivement derrière les barricades enflammées. Ielles sont au niveau de la tranchée sur le chemin d’accès principal, après « La Rue Rale ». Les casqués passent également dans les bois. Il y a de nombreux tirs de gazs lacrymogènes, apparemment aussi le flashball est sorti. D’autres occupants, dont des enfants, ont pu se replier dès le début de l’arrivée.

(suite…)

Arrêté du 3 juillet de l’Anti-préfecture relatif au match de l’Equipe de France de Football

Anti-préfecture de Mandres-en-Barrois
le 3 juillet 2016

Arrêté n°1312 sur le caractère essentiellement antinucléaire de l’équipe de France de football

  • Considérant que l’occupation du bois communal de Mandres-en-Barrois (Meuse, 55) offre depuis
    deux semaines des moments d’une intensité rare, des expériences collectives inédites et que cela ne
    peut-être envisagé que comme le début de quelque chose de plus grand,
  • Considérant que la menace d’une expulsion manu militari a plusieurs fois été brandie et que celle-ci
    nécessiterait une opération policière d’ampleur,
  • Considérant que la mise en place de ce dispositif dépend de l’état de disponibilité des forces de
    l’ordre et que celles-ci sont actuellement massivement déployées sur le territoire afin de
    « sécuriser » les différents sites accueillant l’évènement sportif UEFA EURO 2016,
  • Considérant que plus le tournoi de balle au pied touche à sa fin, plus le nombre de sites impactés se
    réduit et partant, le nombre d’escadrons de police mobilisés aussi,
  • Considérant que l’équipe de France de football est en capacité de mettre des dizaines de milliers de
    personnes dans la rue, sur l’ensemble du territoire et que la multiplication de ces rassemblements
    nécessite l’entière mise à disposition des forces de sécurité,

Nous, habitant.e.s et occupant.e.s de la forêt libérée de Mandres-en-Barrois, affirmons ce jour notre
soutien le plus total à l’équipe de France de football et déclarons d’utilité publique sa victoire
perpétuelle dans un Euro interminable,
Reprenons pour cela et en signe de notre bonne foi, ces mots d’un philosophe franco-belge :

« On est champion,
on est tous ensemble,
c’est le grand jeu,
la France est débout,
Allez les Bleus,
On est tous avec vous »

johnny

Communiqué – Dans la forêt libérée de Mandres, la stratégie de la tension a commencé

Dans la forêt libérée de Mandres, la stratégie de la tension a commencé autour de la forêt libérée

Il n’aura pas fallu 2 jours pour que l’ANDRA et la préfecture commencent à harceler, de différentes manières, les personnes impliqué-e-s dans la manifestation du dimanche 19 juin et l’occupation de la forêt. Leur but : faire peur, diviser, et déjà essouffler le mouvement, pour mieux pouvoir le cueillir lors d’une éventuelle évacuation policière.

Première incartade des vigiles à l’entrée du bois

Mardi 21 juin, 15h, grosse tension à la barricade d’entrée de la forêt « La Rue Rale ». Une voiture avec 5 vigiles a débarqué, et a eu le temps de démonter une petite barricade à l’entrée avant de se faire chasser par plusieurs occupant-e-s déterminée. La voiture a battu en retraite et est retourné derrière les gendarmes en faction au carrefour une centaine de mètres plus loin. Quelques minutes plus tard une fourgonnette de gendarmerie est venue en renfort. Il semblerait que la stratégie de la tension de l’ANDRA et de la préfecture a commencé. Son but principal : susciter l’essoufflement du mouvement dans les jours à venir pour mieux pouvoir amorcer une évacuation avec grands renforts. En le faisant se replier, en interne, sur les seules nécessités d’autodéfense au détriment du lien avec le reste du mouvement ; et à l’extérieur, en apeurant les autres personnes se rendant sur les lieux, et à terme les habitant-e-s alentours en faisant de la propagande sur la « violence » supposée des possibles altercations. Pas de bol : on est parfaitement conscients de ces stratégies minables, quoi que raffinées, et on saura attendre les vigiles comme ils se doivent : avec de quoi se protéger, mais aussi les filmer et retransmettre tous leurs agissements en direct.

Premières pression sur des paysan-ne-s participant-e-s au mouvement

Stratégie de la tension, deuxième épisode, autres dispositifs. Mardi 21h, 15h45. Au point de contrôle des gendarmes, un paysan impliqué dans l’occupation se fait alpaguer par Emmanuel Hance, le M. « relations humaines » et accaparement des terres de l’ANDRA, un individu craint et/ou détesté par une majorité des habitant-e-s, qui fait la loi dans la région auprès des paysans et autres propriétaires de terres agricoles et de forêt. La discussion dure un bon quart d’heure. Morceau choisi de la leçon de morale du grand manitou des opérations de l’ANDRA : « Je comprends votre engagement lors des 200 000 pas, mais là vous allez trop loin, parmi les gens impliqués dans la manifestations de dimanche il y en a 50 qui n’ont que leur sac à dos, quand ils partiront vous vous retrouverez tout seul… » Les ficelles sont grosses : il s’agit de susciter la désolidarisation et la dissociation au sein du mouvement de lutte et d’occupation envers une frange indésirable (qu’on la nomme « casseur » dans les mouvements sociaux, « zadistes » dans les luttes contre des projets, marginal, sans-abri, etc etc).

Encore un autre épisode pour la fabrique de la dissociation : hier 20 juin, un autre paysan participant à la journée du 19 juin s’est fait alpaguer, toujours par Hance. « Hé, je t’ai vu dimanche dernier, t’étais masqué avec ton père ! ». Rien de tel pour faire monter les choses en pression.

Les habitant-e-s de Mandres-en-Barrois et alentours impliqué-e-s dans l’occupation ne sont pas dupes de ces manœuvres de division. L’ANDRA procède ainsi depuis 20 ans et elle a largement contribué à ruiner les formes de solidarités villageoises qui existaient encore, et à monter les gens les uns contre les autres. Le but de tous ces dispositifs est clair : faire peur, diviser, et déjà essouffler le mouvement, pour mieux pouvoir le cueillir lors d’une éventuelle évacuation policière, qui interviendrait probablement après le dépôt de plainte que Baillet, le directeur technique de l’ANDRA, a évoqué le 20 juin dans les médias.

Aujourd’hui, dans le bois Lejuc libéré, une forme de communauté se cherche dans la défense de grands chênes et de jeunes charmes. Nous allons retourner la stratégie de la tension en une plus forte coopération et en résistance aux sales manœuvres de l’ANDRA !

Quelques occupant-e-s de la forêt

Contact presse : sauvonslaforet@riseup.net / Tel 07 58 65 48 89

Site : vmc.camp

Communiqué – Bure, pas de ZAD que cache la forêt !

Le bois de Mandres-en-Barrois est occupé, mais surtout libéré !

Non, il n’y a et n’y aura toujours pas de ZAD à Bure, n’en déplaise aux médias avides de sensationnalisme qui crient au « zadiste » dès qu’une résistance à un projet d’aménagement du territoire se mue en occupation.

Le terme de ZAD a beau faire partie à présent du dictionnaire, il ne saurait résumer et recouvrir les réalités propres à chaque lieu de lutte. Ce qui se vit à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, pour exceptionnelle que soit la teneur de la communauté de lutte sur place, ne peut pas être transposé façon « recette miracle » partout où le système capitaliste ravage le territoire de ses chancres en tout genre.

Ce dimanche 19 juin, près de 250 personnes, habitant-es, paysann-es et opposant-es au projet d’enfouissement de déchets nucléaires CIGÉO, après avoir ôté les clôtures, ont envahi la plate-forme de chantier installée dans le bois Lejuq, à proximité de la commune de Mandres-en-Barrois. Ce même bois avait été échangé par l’ANDRA lors d’un conseil municipal organisé à 6h du matin au mois de juillet 2015, a contrario de la volonté des habitant-es de Mandres qui avaient majoritairement voté contre la vente de celui-ci à l’ANDRA, deux ans auparavant.

Un pique-nique de mobilisation dans le bois ce dimanche s’est poursuivi avec une action de réappropriation et d’investissement de la plate-forme de chantier, par les habitant-es dépossédé-es et des opposant-es au projet CIGÉO. Les chemins d’accès ont été entravés afin d’empêcher l’ANDRA de poursuivre son œuvre de destruction de la forêt et un préau construit pour accueillir les soutiens à l’occupation du terrain. Depuis lundi 20 juin, l’aménagement du terrain se poursuit pour continuer d’accueillir des gens sur place et libérer les usages de la forêt par les habitant-e-s dépossédé-e-s et toutes celles et ceux qui souhaitent y passer pour une promenade, une cueillette, le retrait des affouages, un café, etc.

Le bois se transforme en un « Couarail », un ancien mot lorrain qui désigne un lieu de rencontre
villageois où l’on discute en faisant des tâches quotidiennes. Cela ne colle pas avec la définition bornée et enfermante qu’entendent certains journalistes dans le mot « ZAD » qui figent les identités, ghettoïsent l’espace, et
donnent l’illusion d’un anti-monde coupé et hostile à ce qui lui serait extérieur. Tout l’inverse de ce qui se cherche et se construit, déjà, dans ce bois libéré.
En bref cette forêt est bien plus une zone libérée de l’emprise de l’ANDRA – ses vigiles-mercenaires et ses engins de déforestations – qu’une zone occupée par on ne sait quels « zadistes » fantasmés, dont l’image péjorative est bien utile pour apeurer tout le monde.

Pourtant, certains médias hâtifs annoncent déjà l’émergence d’une ZAD, alors que ce mot n’a jamais été revendiqué par les opposant-e-s. Décidément, les idées reçues sont tenaces : à l’été 2015, un campement de 10 jours qui avait rassemblé près de 1500 personnes avait déjà enflammé les imaginations en mal de sensations. Las, la ZAD n’avait pas eu lieu, le campement entièrement démonté. Sont restés surtout de forts liens locaux entre riverains, paysann-es et toutes celles et ceux qui ont participé à ces dix jours de mobilisation et discussion. C’est sur ce terreau que se sont nourris les nombreux moments de mobilisation au cours de la dernière année (occupation agricole des terres de l’ANDRA, chantiers collectifs, grandes marches populaires…), et, aujourd’hui, se construit la libération de ce bois.

Contact presse : sauvonslaforet@riseup.net // 07.58.65.48.89

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#etedurgence

Retour sur les Semis radieux du 15 novembre 2015 !

Avant de remettre le couvert lors du Printemps des luttes paysannes le 16 & 17 avril à Bure, retour sur les Semis Radieux du 15 novembre 2015 ! …

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Figure 1 : Les tracteurs ouvrent la marche en direction du laboratoire de l’ANDRA

Les cris enthousiastes des manifestants retentissent dans le calme dominical du village de Saudron. « Les tracteurs avec nous ! » : douze engins arrivent en conquérants sur la place de l’église, munis d’outils de travail du sol et de généreux sacs de semences. Dimanche 15 novembre, malgré la tristesse post-attentats et les interdictions de manifester, près de 200 opposants au projet CIGEO (Centre Industriel de Stockage Géologique) se sont réunis pour occuper temporairement les terres de l’ANDRA lors des « Semis radieux », sous un soleil qui ne l’est pas moins.

« L’ANDRA a dépensé près de 15 millions d’euros et s’est accaparée environ 3000 ha de terres agricoles et forêts en sept ans pour nettoyer le territoire de ceux qui y vivent et y cultivent. » explique Romain Balandier, le porte-parole de la Confédération Paysanne de Lorraine. « Depuis la fin de l’été les travaux se sont intensifiés avec le début de fouilles archéologiques. 300ha ont déjà été retirés à l’usage des agriculteurs qui en bénéficiaient auparavant au titre de prêts gratuits. A terme, c’est près de 600 ha qui seraient rasés par la poubelle nucléaire ! Il faut réagir en occupant le terrain ! »

« Des semis radieux, pas des champs irradiés ! »

Le top du départ est donné : les tracteurs ouvrent la marche direction l’ANDRA, suivis par les manifestants, fourches et pioches brandies vers le ciel. Les chants révolutionnaires des chorales se mêlent à la batucada et aux slogans offensifs. L’ambiance est joyeuse et la présence policière discrète. Au loin, on aperçoit le site du laboratoire : une excroissance urbaine bardée de grillages, de caméras et de vigiles, qui a surgi de terre depuis 10 ans pour préparer le projet de poubelle nucléaire.

Après 1km, le cortège s’empare d’une parcelle située à un jet de pierre des locaux de l’agence. La foule effervescente contraste avec le triste paysage environnant : derrière les grillages du bâtiment, les tractopelles à l’arrêt sont gardées par des vigiles. Les engins reprendront le lendemain leur chantier en creusant les centaines de tranchées en contrebas. Mais pour l’heure, les manifestants se mettent en ordre de bataille et emboîtent le pas aux tracteurs qui avancent de front.

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Figure 2 : l’arrivée du cortège sur les terres de l’ANDRA. En arrière plan le site de « l’espace technologique » où les tractopelles de chantier sont garés.

« Ca me rappelle ma jeunesse ! » Yves* (les prénoms des manifestants ont été changés), ancien agriculteur octogénaire habitant un village voisin, fait virevolter son poignet d’un geste sûr. Les graines de la résistance pleuvent sur le lit de semailles légèrement travaillé. Devant lui, de jeunes enfants, seaux de graines à la main, apprennent à leur tour le geste universel du semeur. Derrière eux, d’autres plantent des rangées d’arbrisseaux. « On comprend mieux pourquoi ils n’ont toujours pas réussi à creuser leur poubelle en 22 ans ! » plaisante Michel Marie, opposant historique du CEDRA, qui creuse avec effort un trou dans la terre sèche et rocailleuse pour y planter un jeune pommier.

« C’est vrai que la terre est dure, il n’a pas plu et elles sont confisquées à l’usage agricole depuis plus de deux mois. Mais peu importe… La terre à ceux qui la travaillent ! » lance Romain Balandier, bravache, du haut de son tracteur. « On sème de l’orge, du blé, de la moutarde, de l’avoine, et on fait même de l’agroforesterie avec des arbres fruitiers, des arbres de haies, et des plantes d’ornement : cette diversité est à l’image du mouvement de lutte ! »

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Figure 3 : les semeurs en herbe à l’oeuvre !

Résistance populaire et paysanne

Enfants et adultes, anciens et nouveaux militants anti-CIGEO, membres d’associations, d’AMAP, squatteurs des villes et des ZADs, habitants du coin : la foule est hétéroclite. « L’ANDRA menace la terre, qui est notre bien commun. Le semis collectif réunit beaucoup de gens différents pour se réapproprier des savoir-faire qui touchent tout le monde. Et puis la lutte de Notre-Dame-des-Landes a donné une nouvelle force à ce geste d’occupation vieux comme les luttes paysannes ! » explique Simon, animateur d’un groupe de maraîchers.

Les paysans, justement, sont venus en nombre : de la Meuse, de Haute-Marne, des Vosges et même d’Alsace. La douzaine de tracteurs présente est quasiment un record dans l’histoire des 20 ans de la lutte contre CIGEO : ils étaient 7 lors des 100 000 pas à Bure le 7 juin. « Il y a un département qui disparaît à cause de l’étalement urbain et des projets inutiles tous les 8 ans, et ici l’ANDRA s’accapare 850 hectares de terres agricoles ! » explique un éleveur venu d’Alsace. « Du coup les prix augmentent et ici comme ailleurs les jeunes ont du mal à s’installer, tout ça avec la complicité de la SAFER {Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural, organisme chargé de favoriser l’installation et/ou la consolidation des exploitations agricoles} ! » proteste-t-il.

A ses côtés, Paul hoche la tête. Ce jeune agriculteur d’un village voisin est directement impacté par les accaparements fonciers. Il cultivait une dizaine d’hectares parmi les 300 que l’agence a retiré à la fin de l’été. « La SAFER refuse systématiquement mes demandes d’obtention de terres, et le prix grimpe d’année en année à cause des échanges de l’ANDRA ». Pour inciter les propriétaires à céder leurs parcelles, l’agence fait monter les enchères des terres agricoles jusqu’à 7000 euros l’hectare, tandis que des forêts grimpent jusqu’à 11 000 euros, soit deux à trois fois le prix du marché.

Beaucoup d’autres agriculteurs directement impactés ont peur des représailles et préfèrent ne pas s’impliquer lors des manifestations. « L’ANDRA menace les propriétaires récalcitrants d’expropriations ou de contrôles d’exploitation pour les faire plier si les propositions d’échanges ne suffisent pas » explique Thierry Jacquot, éleveur venu des Vosges. Beaucoup des agriculteurs mobilisés viennent du reste de la sous-région, à 20km et plus. « Les échanges fonciers nous concernent moins directement, on se sent plus libre de soutenir les agriculteurs menacés et leur montrer qu’il ne sont pas seuls. Que c’est possible de résister tous ensemble. »

Ce soutien populaire et paysan commence à se faire sentir localement : c’est l’une des première fois que Paul participe à une manifestation contre CIGEO, tout comme de nombreux habitants des villages alentours. Un autre agriculteur du coin, qui a du échanger ses terres avec l’ANDRA il y a quelques années, a prêté pas moins de 4 tracteurs pour la manifestation…

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Figure 4: Les manifestants sous la lumière du crépuscule, avant de repartir…

« Cet été on fait les récoltes radieuses ! »

L’autre défi, pour Romain Balandier, c’est de mobiliser encore plus largement et placer les organisations professionnelles devant leurs responsabilités. « Je me demande bien quelle est la position des Jeunes Agriculteurs (JA) ou de la FNSEA sur le projet ? Pourquoi la semaine dernière les JA d’Alsace ont semé 40 ha de terres contre la construction d’une zone commerciale et aujourd’hui ils ne sont pas là ? Il y a des contradictions !».

Les forêts sont aussi dans la ligne de mire des opposants au projet. L’ANDRA reste très évasive sur la finalité des 2000ha de bois qu’elle s’est appropriée : compenser les futurs déboisements liés aux travaux ? Sécuriser ses financements ? Ou, pour Pascale Combettes, présidente de Mirabel Nature Environnement, « servir de ressource au projet opaque du CEA SYNDIESE, à 2km en contrebas, qui vise à transformer des forêts de Lorraine en biocarburant » ? L’agence a d’ores et déjà fait des coupes rases et des coupes préventives de grands arbres dans certaines parcelles. « C’est peut-être pour y empêcher la construction de cabanes en hauteur… » suppose Sylvie, habitante de la Maison de résistance à la poubelle nucléaire.

Au soleil couchant, manifestants et tracteurs quittent leur champ de lutte et laissent derrière eux 2ha de vie dans le désert nucléaire. « On sait que tout sera probablement détruit par les tractopelles dans quelques semaines. Mais depuis 1998 les agriculteurs n’étaient plus revenus occuper les terres de l’ANDRA. Et il fallait se retrouver pour ne pas céder à l’impuissance et la sidération, pour continuer à se réapproprier nos vies ensemble, pour semer la vie contre les semeurs de morts des industries de l’armement et du nucléaire. Ce qu’on a semé aujourd’hui c’est l’espoir et le renouveau de la lutte ! » proclame Claude Kayser, un opposant historique du collectif BureStop, très ému. Au retour à la Maison de résistance à Bure, devant un concert et une soupe chaude, Paul l’interpelle : « Alors cet été on fait les récoltes radieuses ? Et cette fois j’amène ma moissonneuse !

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Avant les récoltes radieuses à l’été, il y aura bien un Printemps des Luttes Paysannes ! Toutes et tous à Bure le 16 & 17 avril !